Poste de péage

Les barrières à péages d’Outremont

En 1840, l’état des nombreuses voies de circulation de Montréal est jugé intolérable, en particulier par les cultivateurs de l’île qui peinent à transporter leurs produits jusqu’aux places de marché montréalaises. Sensibilisé à cette cause, le gouvernement du Bas-Canada impose une mesure d’origine britannique : le système du chemin de barrière à péage dont il confie la réalisation au Montreal Turnpike Trust ou Commission des chemins à barrière qui démarre avec un prêt de 200 000$. La cause étant pressante, et cette somme insuffisante, on ajouta un péage et un péager à chaque barrière. Trois ans plus tard, neuf barrières à péage sont en activité sur l’île.

Le 2 novembre 1843, James Holmes, le secrétaire des syndics, précise que pour traverser Outremont, les chemins à entretenir sont :

« Chemin de Ste. Catherine – depuis le chemin de la Côte des Neiges, jusqu’à l’hôtel du Mile End.

Depuis la barrière près de Mile End, jusqu’au Chemin de Victoria, via le chemin de Ste Catherine. »

Dès l’instant où il a fallu se déplacer sur les chemins, leur entretien s’est avéré problématique. Qu’il s’agisse de la boue entre les orages, de la neige et de la glace durant les hivers, on s’engage prudemment, transportant même avec soi les planches pouvant servir de pont au-dessus des mares vaseuses. Dans les campagnes, chaque habitant est obligé d’entretenir le chemin longeant sa terre et de jeter un ponceau au-dessus des ruisseaux afin que le voyageur puisse poursuivre sa route. Certains installent une barrière à chaque extrémité de son bien. Et, on ne passe pas sans payer son dû! En Nouvelle-France, le grand-voyer veillait tant bien que mal à l’exécution des consignes mais, déjà, au début du XIXe siècle, la population, toujours plus nombreuse, ne pouvait que déplorer l’état lamentable des chemins, aussi le gouvernement du Bas-Canada permit-il la création d’entreprises vouées à la construction de routes à péage là où elles s’imposaient.

Une première barrière à péage est implantée à un demi-mille de l’Hôtel-Dieu de Montréal, au tournant du chemin de la Côte-Sainte-Catherine et de la future avenue du Mont-Royal alors en construction. En 1890, le tracé de plusieurs nouvelles routes sur le territoire de Montréal, force le déplacement de cette barrière vers l’angle de la rue Wiseman, à quelques centaines de mètres de l’hôtel-de-ville actuel, ce qui a lieu au mois d’octobre. Au mois d’avril 1891, la maison de bois où résidait le gardien de la barrière est mise en vente par les syndics en même temps qu’un terrain de 6 000 pieds carrés.

Poste de péage
Peinture de Cornelius Krieghoff datant de 1897 ayant pour titre: Habitants fuyant le poste de péage. Vient de la Bibliothèque des Archives du Canada

A compter du mois d’avril 1898, les sommes déboursées par les usagers des chemins à péage sont versées à la Corporation d’Outremont dont les résidents n’ont plus à débourser pour utiliser la Côte Sainte-Catherine. Les citoyens sont peut-être libérés de l’obligation de payer pour entrer ou sortir de chez eux, mais les barrières demeurent : « […] il est expressément déclaré dans l’Acte de commutation des péages d’Outremont en faveur d’Outremont que les syndics auront le droit de maintenir une barrière au chemin connu sous le nom de « Bellingham Road ». La commutation signifiait qu’Outremont avait acheté le chemin jusqu’alors administré par le syndic à raison de 4 000$ par mille. C’est là, sur cette voie aujourd’hui partiellement intégrée à l’avenue Vincent-d’Indy qu’étaient perçus les droits de transport de la pierre provenant de la carrière d’Outremont dont le bien fond appartenait à la Cité de de Montréal.

La création de la barrière de la “Bellingham Road” n’avait pas débarrassé le chemin de la Côte-Sainte-Catherine de l’encombrante barrière de la rue Wiseman qui semble avoir été tout simplement été installée en plein devant l’hôtel-de-ville. Une disgrâce! En 1906, le conseil municipal étudie le moyen de s’en débarrasser, mais il hésite à trop faire de bruit car, est-il écrit dans La Patrie du 20 décembre, « la barrière tombera d’elle-même et disparaîtra si, comme l’événement s’annonce, la Côte-des-Neiges s’annexe à Montréal », ce qui aura lieu quatre ans plus tard seulement…

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